Inégalités juridiques et droits humains dans le projet de loi sur l’organisation de la presse : le Conseil national des droits de l’homme exprime de vives critiques.

Dans une démarche significative reflétant l’inquiétude des institutions de défense des droits humains quant à l’impact de certaines lois sur les droits fondamentaux, le Conseil national des droits de l’homme a soumis sa note concernant le projet de loi n° 026.25 relative à la réorganisation du Conseil national de la presse.
Cette note a été présentée à la demande du président de la Chambre des représentants, mais ce qui importe davantage, c’est qu’elle met en lumière les dysfonctionnements juridiques et les questions de droits qui pourraient résulter de ce projet s’il devait être adopté dans sa version actuelle.
Le Conseil estime que de nombreuses dispositions du projet sont en contradiction avec les principes constitutionnels garantis par la Constitution du Royaume du Maroc, notamment en ce qui concerne la liberté d’opinion et d’expression, soulevant ainsi des interrogations sur sa constitutionnalité.
Parmi les principales observations formulées dans la note du Conseil national des droits de l’homme, figure la nécessité de remettre en question plusieurs articles du projet qui vont à l’encontre des droits des journalistes et des acteurs médiatiques.
La note considère que les textes contenus dans le projet de loi ne contribuent pas à renforcer l’indépendance de la presse, mais, au contraire, risquent de restreindre le champ de la liberté d’expression au Maroc.
Le document souligne que le projet de loi présente un ensemble de dysfonctionnements juridiques qui menacent l’équilibre crucial entre l’indépendance de la presse et l’autorité réglementaire des institutions concernées.
De plus, l’absence de textes juridiques garantissant les droits et la protection des journalistes, ainsi que le manque de clarté dans la relation entre les organes réglementaires au sein du Conseil national de la presse, constituent un important déséquilibre qui menace l’efficacité de cette loi pour promouvoir la liberté de la presse.
Le Conseil national des droits de l’homme n’a pas seulement critiqué, mais a également formulé 40 recommandations précises pour réformer le projet en alignement avec les principes constitutionnels et internationaux.
Parmi ces recommandations, le Conseil appelle à clarifier la nature juridique du Conseil national de la presse, à ancrer l’indépendance institutionnelle et à éviter les chevauchements de rôles entre les organes de gestion fonctionnelle et ceux chargés des questions éthiques.
Il a également insisté sur la nécessité de renforcer la représentation des femmes au sein du Conseil, d’intégrer les plateformes numériques et les nouvelles formes de média dans le projet, ainsi que de créer un mécanisme d’interventions rapides en cas d’abus graves.
Outre les recommandations spécifiques au projet de loi, le Conseil a présenté 10 recommandations générales relatives à la promotion du droit à la liberté d’expression, parmi lesquelles figure l’appel à réduire l’intervention législative dans le domaine de la presse au profit de l’autorégulation, illustrant ainsi le changement nécessaire vers un environnement médiatique indépendant et sécurisé.
Le Conseil a également insisté sur l’importance de soutenir l’indépendance des entreprises de presse, de s’opposer aux discours de haine dans le cadre des principes des droits humains, et de supprimer les lois pénales relatives à la diffamation.
À travers sa note, le Conseil national des droits de l’homme a exprimé son regret de ne pas avoir permis aux membres de la Chambre des représentants de prendre connaissance de ses observations avant la discussion et le vote sur le projet de loi.
Néanmoins, le Conseil a affirmé que le Conseil des conseillers a encore l’occasion de réexaminer le projet de loi et de tirer parti de ses recommandations lors des sessions de discussion de ses dispositions.