Le peuple du ‘passeport rouge’… une bombe à retardement au cœur du système algérien

Dans un paysage politique inhabituelle, le régime algérien se retrouve aujourd’hui face à un adversaire de nature particulière, non pas issu de l’opposition traditionnelle ou des mouvements populaires, mais de son propre cercle restreint, qui a longtemps constitué la pierre angulaire de sa force.
Il s’agit de ce que l’on appelle désormais le « peuple du passeport rouge », des milliers de privilégiés qui ont obtenu des passeports diplomatiques ou spéciaux grâce à leur proximité avec le palais de la Mouradia et la clique militaire au pouvoir, ou à leur appartenance à des familles influentes dans les domaines de la politique, de la sécurité et des renseignements, sans oublier les hommes d’affaires et les journalistes.
Ces personnes ont toujours bénéficié d’avantages exceptionnels, notamment un accès facilité à « Maman France », où se trouvent leurs fonds entassés dans les banques parisiennes, leurs propriétés luxueuses sous forme d’appartements et de villas, ainsi que leurs projets d’investissement allant des grandes entreprises aux petits magasins détenus par leurs épouses, enfants ou même amies.
Cependant, la récente décision de Paris d’intensifier la confrontation avec le régime algérien et de priver cette catégorie des privilèges auxquels elle était habituée a bouleversé la donne.
Le « peuple du passeport rouge » s’est soudainement retrouvé privé d’un accès fluide au territoire français, expérimentant, même partiellement, la souffrance du citoyen algérien ordinaire, qui se retrouve à faire la queue longtemps devant les consulats pour demander un visa, lequel est souvent refusé.
Cette privation ne se limite pas seulement aux voyages, elle menace également les intérêts vitaux de cette catégorie, car les fonds détournés, les biens luxueux et les grands investissements sont aujourd’hui en danger, dans un contexte français qui semble vouloir brouiller les pistes.
La conséquence ? Un volcan silencieux au sein des rouages du pouvoir, où les voix commencent à s’élever – tantôt timidement, tantôt ouvertement – contre le président Abdelmadjid Tebboune et le ministre de la Défense, Saïd Chengriha, ce qui ressemble à un coup d’État en douceur de la part d’une élite qui, naguère, faisait partie de la machine gouvernementale, mais qui voit aujourd’hui leur maintien au pouvoir comme une menace directe pour ses propres intérêts.
Il est vrai que le « peuple du passeport rouge » ne descendra peut-être pas dans la rue, mais il dispose des outils et de l’influence nécessaires pour déstabiliser le régime de l’intérieur, et peut-être même renverser la table sur ceux qui étaient auparavant ses alliés.
En Algérie, où la politique est un jeu de subtilités délicates, la colère de cette catégorie pourrait s’avérer plus dangereuse que n’importe quelle opposition populaire.