Les tapis de Tata : une tisse d’innovation et d’authenticité

Le voyage créatif de ces femmes commence dans la nature, où elles recherchent les outils et les extraits liés à l’environnement des oasis qui caractérisent la région de Tata.
De la cueillette des feuilles de henné à la collecte des écorces de grenade, en passant par les plantes de l’indigo et de la rhubarbe, les femmes des douars de Foum Zguid et Tlit participent à leurs rituels spécifiques liés au tissage du tapis traditionnel de Tata, dans une scène qui allie créativité et authenticité.
La fabrication du tapis traditionnel continue d’affirmer sa place parmi les principales manifestations du patrimoine qui incarnent l’identité culturelle locale, reflétant un savoir-faire artistique que la femme rurale a cultivé au fil du temps, développant ainsi son habileté dans ce métier ancestral transmis à travers les générations.
Cette artisanat ancien constitue un vecteur économique et un héritage culturel qui témoigne de la relation entre l’homme et son environnement, alors que les fils formant le tapis sont tissés avec soin pour produire des pièces artistiques ornées de motifs géométriques inspirés de la riche culture amazighe.
Les tapis amazighs se distinguent par leurs couleurs naturelles variées et leurs formes harmonieuses, telles que les lettres tifinagh et les bijoux ornant la femme amazighe de ces régions, faisant d’eux des œuvres d’art vivantes incarnant l’héritage authentique des Amazighs, souvent riches en symboles et en couleurs représentant leurs croyances et leur quotidien.
Le processus de fabrication du tapis de Tata demande beaucoup de temps et d’efforts, reflétant ainsi un savoir-faire unique et un haut niveau de compétence, commençant par la collecte de la laine, qui est souvent celle des moutons, reconnue pour sa résistance et sa souplesse, et parfois du coton est également utilisé.
Après la collecte, la laine est soigneusement lavée pour éliminer la saleté et les impuretés, à l’aide de produits naturels dans le processus de nettoyage, suivie de l’étape de filage à la main pour créer des fils, en utilisant des fuseaux traditionnels, qui peuvent être fins ou épais selon le design souhaité.
Ensuite, le tapis est tissé à l’aide d’un métier à tisser, un cadre en bois contenant les fils de base, où les fils colorés sont insérés de manière à produire le motif et le design désirés. Une fois terminé, le tapis est coupé du métier pour être nettoyé à nouveau, puis les ornements ou les détails manuels finaux sont ajoutés pour rehausser la beauté du tapis avant sa mise sur le marché.
Le tapis de Tata bénéficie d’une place spéciale sur les marchés anciens, attirant particulièrement les touristes étrangers, qui sont émerveillés par sa beauté et son niveau de finition, contribuant ainsi à la promotion de l’artisanat local.
Malgré l’importance de ce métier pour renforcer le statut de la femme rurale et préserver le patrimoine local, l’industrie du tapis fait face à plusieurs défis, notamment une baisse de la demande pour les produits traditionnels, la concurrence des produits industriels et la hausse des coûts des matières premières.
Dans ce contexte, la coopérative artisanale « Al-Majd » de Foum Zguid déploie des efforts continus, soutenus par des programmes de développement local, pour valoriser cet artisanat et ouvrir de nouvelles voies de commercialisation au niveau local et national, en plus de promouvoir les produits lors d’expositions et de circuits touristiques.
À cet égard, la présidente de la coopérative « Al-Majd », Latifa Massai, a souligné que la fabrication du tapis traditionnel à Foum Zguid cherche à concilier la préservation du patrimoine et l’autonomisation économique des femmes travaillant au sein de la coopérative, précisant que ce qui caractérise ces tapis est leur dépendance totale aux matériaux bruts que la nature fournit, ce qui leur confère une beauté exceptionnelle et un caractère authentique.
Elle a ajouté dans une déclaration à l’Agence Maghreb Arabe Presse que ces tapis sont généralement tissés sur des métiers simples, soit à la maison, soit dans des ateliers spécialisés, et que le style de chaque tapis varie d’un modèle à l’autre, chaque type se distinguant par ses motifs, ses couleurs et ses matériaux de fabrication.
Dans le cadre du soutien à la formation professionnelle dans le secteur de l’artisanat, le Centre de qualification professionnelle en arts traditionnels à Tata organise des sessions de formation spécialisées dans la fabrication de tapis traditionnels, dans le but de développer les compétences des bénéficiaires et de renforcer leur intégration économique.
À ce sujet, Mohammed Sdad, un responsable à la Chambre de l’artisanat de la région de Souss-Massa, a précisé que ces formations représentent une véritable opportunité pour les femmes de Tata de mettre en avant leurs capacités, d’échanger des expériences et de leur permettre d’accéder au marché du travail.
Il a souligné que ces formations constituent un levier essentiel pour encourager les jeunes à s’engager dans les domaines de l’artisanat et soutenir l’autonomisation économique des femmes dans les zones rurales, ouvrant ainsi des perspectives prometteuses pour l’entrepreneuriat.
Entre les défis de la préservation du patrimoine et les opportunités d’autonomisation économique, la fabrication traditionnelle de tapis à Tata continue d’écrire de nouveaux chapitres de son histoire, portée par la détermination de ses artisanes et la volonté des acteurs locaux de mettre en valeur son importance patrimoniale et culturelle.
Hajar El Rady et MAP