Interpellation de plus de 200 activistes étrangers au Caire avant le lancement de la « marche mondiale vers Gaza »

Les autorités égyptiennes ont arrêté au moins 200 militants étrangers à l’aéroport du Caire et dans des hôtels de la capitale, en amont du lancement de la « Marche mondiale vers Gaza », qui appelle à mettre fin au blocus de la bande de Gaza, selon le porte-parole de l’initiative.
Seyf Abou Kachk, porte-parole de la « Marche mondiale vers Gaza », a déclaré à l’AFP que le nombre de personnes arrêtées « dépasse 200, avec des nationalités américaines, australiennes, néerlandaises, françaises, espagnoles, marocaines et algériennes ».
Les militants avaient annoncé sur les réseaux sociaux leur intention d’atteindre la frontière égyptienne avec Gaza par le poste-frontière de Rafah, afin de réclamer l’entrée de l’aide humanitaire et la fin du blocus, via des marches et des convois provenant d’Europe et d’Afrique du Nord.
Cependant, le ministre de la Défense israélien, Israël Katz, a demandé à l’Égypte, mercredi, d’« empêcher l’arrivée de manifestants jihadistes à la frontière égypto-israélienne », mettant en garde contre tout « provocations ou tentatives d’entrer à Gaza ».
Katz a qualifié la marche de « mesure susceptible de mettre en danger la sécurité des soldats [israéliens] et qui ne sera pas autorisée ».
Suite aux déclarations israéliennes, le ministère égyptien des Affaires étrangères a publié un communiqué soulignant l’importance d’exercer « une pression sur Israël pour mettre fin au blocus de la bande », tout en insistant sur la nécessité pour les délégations étrangères d’obtenir des « autorisations préalables » avant de visiter la région frontalière.
Le communiqué du ministère égyptien précise : « La seule manière pour les autorités égyptiennes de continuer à examiner ces demandes est de suivre les régulations et procédures en place depuis le début de la guerre sur Gaza, à savoir soumettre une demande officielle aux ambassades égyptiennes à l’étranger, ou via des demandes présentées par des ambassades étrangères au Caire, ou des représentants d’organisations, au ministère des Affaires étrangères ».
De son côté, Abou Kachk a confirmé que ce que le ministère égyptien a stipulé dans son communiqué « correspond exactement aux étapes que nous avons suivies. Nous avons soumis plus de 50 demandes sans obtenir de réponse ».
Il a déclaré à l’AFP que « l’entrée de la police dans les chambres des hôtels, la confiscation des téléphones et la fouille des effets personnels… était totalement inattendue ».
Abou Kachk a expliqué que des membres de la police en civil sont entrés dans les hôtels avec une liste de noms de certains étrangers « et ont interrogé certains d’entre eux, arrêtant quelques-uns et laissant d’autres ».
Il a ajouté que les autorités égyptiennes ont retenu plus de 20 membres de la délégation française à l’aéroport « pendant plus de 18 heures ».
L’AFP a également obtenu des informations concernant l’expulsion de citoyens colombiens et algériens de l’aéroport du Caire.
Le groupe grec participant à la marche a déclaré que « des dizaines de citoyens grecs » faisaient partie des arrêtés « malgré la remise de tous les documents requis et le respect de la loi et des procédures d’entrée dans le pays », avant que les autorités égyptiennes ne les libèrent « après les avoir retenus à l’aéroport pendant dix heures », selon les coordinateurs grecs.
Un communiqué des coordinateurs du groupe grec a confirmé que les participants à la marche demeurent attachés à leur objectif « d’approcher le point le plus près possible de la frontière avec Gaza, pour demander l’ouverture du passage de Rafah et la fin du blocus. Notre mission continue et notre solidarité est inébranlable ».
De plus, les coordinateurs de la marche ont affirmé dans un communiqué jeudi que « des milliers de participants… sont déjà présents en Égypte et prêts à se rendre à Al-Arich demain, puis à Rafah à pied ».
Le communiqué a ajouté : « Nous espérons arriver à Rafah dimanche ».
Les coordinateurs de la marche ont déclaré lors d’une conférence de presse mercredi que 4000 personnes de plus de 40 pays « ont acheté des billets d’avion pour Le Caire pour participer à la marche, et certains d’entre eux sont déjà arrivés », le reste devant arriver jeudi.
Abou Kachk a confié à l’AFP : « Nous continuerons malgré ce qui s’est passé, car le nombre de personnes présentes actuellement en Égypte, et celles attendues aujourd’hui, est suffisant pour organiser cette marche ».
La « Marche mondiale vers Gaza » vise à se déplacer en bus du Caire à la ville d’Al-Arich, dans le nord de la péninsule du Sinaï, puis à se rendre à Rafah à pied, accueillant dans un temps proche un autre convoi nommé « Résilience », parti de Tunisie, à travers la Libye vers l’Égypte par les frontières terrestres.
L’AFP a eu accès à une vidéo montrant un avion transportant plus de trente personnes renvoyées de l’aéroport du Caire criant en français « Le monde est solidaire avec vous… Gaza… Gaza ».
Elle a également obtenu une autre vidéo montrant un groupe de participants à la marche transportés par les bus de l’aéroport entourés par des agents de sécurité.
Une vidéo enregistrée par l’une des personnes arrêtées à l’aéroport du Caire montre une pièce bondée où elles sont retenues « avec 30 ou 40 personnes, et personne ne nous dit rien ».
Un des Français arrêtés et relâchés jeudi matin a confié à l’AFP, sous couvert d’anonymat, : « J’ai été retenu dans une pièce de l’aéroport avec environ 15 autres personnes. J’ai vu un nombre important d’arrêtés, environ 50 ou 60, y compris des Espagnols et des Belges ».
Il a ajouté que certains détenus avec lui avaient été en garde à vue depuis l’aube de mercredi tandis que d’autres avaient été conduits dans des salles séparées « et nous ne les avons plus jamais revus ».
Parallèlement aux développements au Caire, le convoi « Résilience » est arrivé mercredi dans la capitale libyenne Tripoli, avec des centaines de militants venus de Tunisie, d’Algérie, du Maroc et de Mauritanie, en direction de l’est de la Libye, vers la frontière avec l’Égypte.
Il n’est toutefois pas encore clair si le convoi pourra franchir la frontière contrôlée par les forces du maréchal Khalifa Haftar.