Journée mondiale de la lutte anti-tabac : Quelle est la place du Maroc face aux alternatives moins nocives ?

Chaque année, le 31 mai, l’Organisation mondiale de la santé brandit le slogan “s’abstenir de fumer” pour mettre en lumière les risques sanitaires, sociaux et économiques du tabagisme.
Tandis que de nombreux pays s’orientent vers la légalisation et l’accélération de l’adoption de produits alternatifs moins nocifs, comme les cigarettes électroniques et les produits de tabac chauffés, le Maroc accuse encore un certain retard dans ce domaine, soulevant des interrogations sur les raisons de ce ralentissement et les moyens de le surmonter.
Des chiffres inquiétants malgré les efforts de sensibilisation
Selon les données nationales, le taux de fumeurs au Maroc demeure élevé, notamment chez les hommes. Les statistiques du ministère de la Santé indiquent que le tabagisme est responsable de milliers de décès chaque année, sans compter le coût sanitaire et économique exorbitant.
Malgré le lancement du programme national de lutte contre le tabac depuis plusieurs années, ses effets restent limités, en particulier en raison de l’absence réelle d’une stratégie globale prenant en compte les évolutions mondiales dans les politiques alternatives.
Où se manifeste le retard du Maroc ?
- Absence d’un cadre législatif pour les alternatives:
À ce jour, il n’existe pas de loi claire encadrant l’utilisation des cigarettes électroniques ou des produits de tabac chauffés, que ce soit en matière de licence, de commercialisation ou d’avertissements sanitaires. - Vision traditionnelle de l’addiction:
L’approche officielle privilégie l’abstinence totale au lieu d’adopter le principe de réduction des risques qui est devenu une option dans plusieurs pays tels que le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande. - Manque de formation médicale et médiatique:
De nombreux médecins et spécialistes au Maroc manquent d’une formation approfondie sur les alternatives au tabagisme, ce qui nuit à leur capacité à orienter les patients vers des solutions de transition sûres. - Peur de la normalisation du comportement tabagique:
Certains responsables craignent que la commercialisation des alternatives “moins nocives” puisse être perçue comme une incitation indirecte à fumer, au lieu d’être considérée comme une solution temporaire pour arrêter.
Leçons du monde… et occasions manquées
Dans des pays comme le Royaume-Uni, les cigarettes électroniques ont été intégrées aux outils d’aide à l’arrêt du tabac, sous supervision médicale.
D’autres pays ont aussi lancé des expériences réussies dans l’utilisation des produits de tabac chauffés dans leurs stratégies de santé publique.
Toutefois, le Maroc reste hésitant à suivre ces tendances, ce qui prive les fumeurs d’alternatives pouvant les aider à un arrêt progressif et la société de cet outil efficace pour réduire les taux d’addiction.
Entre réglementation et sensibilisation : que faire aujourd’hui ?
- Établir un cadre légal et réglementaire pour les alternatives au tabac qui définit les conditions de leur vente et consommation ainsi que les normes de sécurité sanitaire.
- Renforcer la formation médicale et médiatique sur le concept de réduction des risques et la distinction entre fumer et le tabac comme substance.
- Lancer des campagnes de sensibilisation ciblées sur les alternatives au tabac et leur efficacité dans le cadre des démarches d’arrêt.
- Encourager la recherche scientifique locale dans ce domaine au lieu de se reposer uniquement sur les expériences étrangères.
Conclusion
Le droit à la santé ne se limite pas à l’interdiction, mais inclut également l’accès à des alternatives sûres pour les citoyens.
Alors que le nombre de fumeurs désireux d’arrêter ou de réduire les dommages augmente, il semble temps pour le Maroc de revoir sa stratégie face au phénomène, en s’éloignant d’une logique uniquement prohibitive et en s’approchant d’un logique de sauvetage et de transition progressive.
“L’objectif n’est pas de lutter contre les fumeurs, mais de les aider à vivre en meilleure santé.”